Caporal Francine Paquette


Francine est née dans le quartier Rosemont le 24 juillet 1961.  Elle a grandi à plusieurs endroits, dont Montréal, Châteauguay et à Ville de Léry, où elle habite encore aujourd’hui.


La famille de Francine était particulière : son père était très strict et sa mère était moderne. L’aîné d’une famille de 3 enfants, Francine a deux frères plus jeunes qu’elle.  Ils avaient beaucoup de liberté, ce qui n’était pas le cas de Francine.  Dès le début de l’adolescence, elle est en conflit constant avec son père. Elle voudrait bien quitter mais comme elle est trop jeune, elle ne peut le faire.  Cela ne l’empêche pas de le désirer ardemment. À la fin du secondaire, Francine veut se diriger vers la médecine.  Elle en fait part à son père qui lui répond qu’elle n’a pas besoin d’un diplôme universitaire pour laver des couches.  Elle doit alors se tourner vers d’autres options.


En 1978, à l’âge de 16 ans, elle voit la publicité de l’armée qui dit « Si la vie vous intéresse… » Elle se rend au centre de recrutement où elle apprend que l’âge minimum pour l’enrôlement est de 17 ans et qu’elle aura besoin de la signature d’un parent.  Aucun problème.  Elle va voir sa mère qui accepte de l’accompagner et de signer pour elle. Le jour de son 17e anniversaire, elle se rend au centre de recrutement avec sa mère, son père n’ayant pas encore été mis au courant. Il apprend seulement la nouvelle le jour où il va la reconduire à Saint-Jean-sur-Richelieu pour qu’elle débute son entraînement.  Son père lui donnait 3 semaines avant qu’elle ne change d’idée : elle est restée 22 ans dans l’armée.


Le premier entraînement pour les soldats sert à leur montrer la base, mais aussi à apprendre aux soldats à prioriser.  Francine a vite compris que tu ne dois pas te laisser impressionner par les demandes des officiers tels que nettoyer ses bottes, faire son lit, etc.  L’important est de bien faire les choses sans se laisser affecter. 


Suite à son entraînement, elle doit apprendre l’anglais.  Elle passe 11 mois à l’école des langues. 


Vient ensuite le moment pour Francine de choisir son métier.  Elle choisit technicienne de moteurs d’avions. Elle va suivre sa formation à Summerside.  Elle se rend vite compte que ce métier n’est pas pour elle. Elle termine quand même son cours mais elle ne réussit pas (volontairement ou pas, le mystère demeure) ses examens avec succès.  Elle demande donc de changer de métier.  Elle choisit le métier de commis-comptable et est transférée en Colombie-Britannique, où elle demeure 4 ans.


Francine se porte toujours volontaire à chaque fois que les Forces ont besoin de quelque chose.  Cela lui permet de faire bien des choses et entre autre un séjour de 4 ans en Allemagne, où elle rencontre son premier mari, un officier. Être une femme dans l’armée n’est pas toujours évident, surtout à cette époque là.  Fréquenter un officier alors que tu es une femme soldat peut être mal vu par certains.  Francine en fit la triste expérience.  Même après son mariage, qui eut lieu durant sa dernière année en Allemagne.  De retour en Colombie-Britannique, elle vit une période sombre.  Son mariage à un officier la met à l’écart.  La coutume non-officielle veut que lorsque survient un mariage entre un officier et une soldate, la femme quitte les Forces.  Elle ne veut pas réellement quitter l’armée mais elle prend malgré tout la décision de le faire. Grâce à son commandant et à ses arguments convaincants, elle décide de revenir avant la date de non retour.    Elle a de la chance que cela soit possible et qu’elle puisse poursuivre sa carrière. 


Francine milite beacoup pour que les femmes puissent aller à Chypre. L’armée y était présente mais les femmes n’avaient pas le droit d’y aller.  Après beaucoup d’efforts, elle obtient finalement ce qu’elle veut : elle ira en mission à Chypre pendant 6 mois.  Avant de partir, elle  doit passer une batterie de tests.  Mais surprise, son examen médical révèle qu’elle est enceinte.  Elle ne peut donc pas y aller. Cela dit, sa lutte à permis à d’autres femmes d’y aller et d’en profiter.    

 

Elle est ensuite mutée à Petawawa, mais ce ne fut pas une expérience tellement positive pour Francine.   Une des personnes qui étaient contre son mariage s’y trouve. Cette personne lui a fait la pire évaluation de sa carrière lors de sa dernière année en Europe, juste avant son mariage.  Mais en Colombie-Britannique, elle avait eu d’excellentes évaluations… Son séjour à Petawawa dure 3 an pendant lesquels cette personne essaye toujours de lui nuire. 


Francine est ensuite mutée à Ottawa, ce qu’elle appelle le trou noir : tu sais quand tu y arrives, mais tu ne  sais pas quand tu vas quitter.  Elle aime les premières années là-bas mais après un bout de temps, elle veut faire autre chose. Cela dit, durant son séjour elle a obtenu de très intéressantes opportunités, comme aller en Haïti avec les enquêtes spéciales.


Pour sortir d’Ottawa, elle doit faire quelque chose qu’elle n’aurait jamais pensé faire : elle se porte volontaire pour aiguiller les jeunes soldates du 22e régiment.  Elle transfère à la Citadelle de Québec. Sur le coup, elle le regrette… mais après coup, elle y vit les 3 meilleures années de sa carrière : elle s’entraîne beaucoup avec les soldats, elle a du plaisir et ironiquement, elle ne voit jamais arriver de femmes soldats!


Avant d’être comptable, Francine est militaire.  Elle se maintient en forme. L’entrainement militaire n’est pas facile. Elle dit qu’on apprend à vivre avec ça mais ce n’est pas toutes les femmes qui sont capables.  Les exercices sont souvent difficile, et encore plus pour les femmes : 3 semaines dans le bois à partager une tente avec 10 hommes et 2 femmes, sans se laver… Tout cet entrainement au cours de sa carrière lui a causé des blessures, entre autre aux genoux et au dos.  Elle est muté à Toronto dans une unité de réserve ce qui lui permet de voir un médecin spécialiste.  Elle y reste un an et ce fut la dernière année de sa carrière.  Son dos est si mal en point qu’elle doit quitter sinon elle sera paralysée à 50 ans. 


Francine aurait aimé resté 35 ans dans l’armée, elle y resta 22 ans.  Ce qu’elle a le plus aimé de son métier? Le mélange entraînement et travail. Les différents sports, les aventures qu’elle a vécu dans le cadre de son travail. Ses missions et les voyages qu’elle a pu faire. 


Son grand père lui avait déjà dit : « si tu fais ce que tu aimes, tu ne travailleras pas un jour dans ta vie! » Cela représente bien la carrière de Francine.


J’aimerais remercier Francine d’avoir accepté de participer au Projet Vétérans et de sa générosité lors de notre entrevue et de la prise de photo.